
Eder. Óleo de Irene Gracia
Iván Thays
Pedro Ángel Palou, uno de los cinco de Carlos Fuentes. Fuente: alfredogodinezblog Y mientras todos celebramos el triunfo de Bolaño, hay alguien que en París no celebra: Carlos Fuentes. Todavía me parece increíble que Carlos Fuentes haya declarado eso a un medio peruano. En fin, eso sí, Fuentes es muy generoso con los escritores jóvenes mexicanos de la generación del Crack. Un ejemplo de eso es el artículo que escribe en Le monde donde comenta muy elogiosamente a cinco autores de su país, en el marco del Salón del Libro: Jorge Volpi, Ignacio Padilla, Pedro Angel Palou, Cristina Rivera Garza y Xavier Velazco. Dice cosas así:Amphytrion, d’Ignacio Padilla, rend compte des stratégies de survie qui nous obligent à changer d’identité dans un monde qui exige de faux passeports pour entrer au paradis ou être expulsé vers l’enfer.Paradiso clausurado, de Pedro Angel Palou, explore les incertitudes d’un esprit lucide que son intelligence conduit à la destruction. Destruction qui ne laisse debout que cela même qui l’anéantit : la parole, la littérature. Palou a, par ailleurs, rédigé deux extraordinaires biographies historiques, l’une d’Emiliano Zapata, l’autre de José ManuelMorelos, dans lesquelles il nous raconte non seulement ce que nous croyions savoir des deux héros, mais ce que nous pouvions imaginer des hommes.Enfin, A la recherche de Klingsor, de Jorge Volpi, décrit le dilemme de Werner Heisenberg, le physicien allemand, Prix Nobel 1932, chargé de fournir à temps la bombe atomique à Hitler. (…) Héros ou traître ? Fidèle ou infidèle à la science ? Fidèle ou infidèle à sa patrie ? Chercha-t-il à avancer le plus rapidement possible dans la mise au point de l’arme atomique afin d’assurer la victoire à Hitler ? Ou retarda-t-il délibérément son travail afin d’y faire obstacle ? (…) Klingsor – héros germanique mythique, enfermé dans son château, se regardant dans son miroir, jaloux de sa propre image – repose sur un puissant substrat culturel, il nous projette dans le véritable combat de civilisations, moins simplet que celui imaginé par Huntington, mais un autre, plus profond, dans lequel la foi scientifique se substitue à la foi religieuse pour finalement révéler qu’elle est encore moins digne de confiance que la religion. Tous les grands physiciens ont un profil de criminel, déclare l’un des personnages de Volpi. En effet, parce que la science a cessé d’être «innocente», la science peut, non seulement altérer la face de l’univers, mais le détruire.Dans un style totalement différent, on trouve Cristina Rivera Garza et son magnifique Nadie me verá llorar (Personne ne me verra pleurer), une véritable révélation. Le roman, aurait-on tendance à dire à première vue, «se passe au Mexique». Erreur. Il se passe dans un asile de fous. Il se passe dans un lupanar, et, bien que se situant dans une époque déterminée – les vingt premières années du XXe siècle -, il se déroule en réalité dans un temps littéraire où le contemporain et le non-contemporain coexistent. Il s’agit d’un roman nu… mais vêtu de noir de la tête aux pieds.Enfin, last but not least, mon cinquième est Xavier Velasco et son Diablo guardián, Le Diable gardien. C’est l’histoire d’une vilaine fille qui vole à ses parents l’argent qu’ils ont volé à des oeuvres de charité, et qui, avec cet argent, part pour New York où elle se lance dans la vie érotique la plus débridée. Le Diable gardien est raconté à la première personne par la jeune délurée, et son vocabulaire est celui d’un parler populaire passé au tamis de la petite bourgeoisie. La base du langage populaire est celui des rues, le plus changeant qui soit. Or le picaresque est essentiel à la littérature. L’épopée ne nécessite qu’un seul langage : tout le monde se comprend, Hector et Achille, le Troyen et le Grec. Le roman, en revanche, requiert la pluralité des langages. Anna Karénine ne comprend pas son mari, pas plus que Madame Bovary le sien. Don Quichotte parle le langage de l’épopée chevaleresque. Sancho Panza, celui du picaresque populaire. A eux deux, ils créent le roman moderne, la tradition cervantesque. Diversité de langages. Réexamen de tous les niveaux de langue. Langage métis. Le nôtre. Dans Diablo guardián, Xavier Velasco discrédite le langage de l’autorité. Le roman dés-autorise. Invasion de néologismes. Vocables irrespectueux. Langage de l’incertitude.